Quand on parles d’amour, il y a toujours une équation simple qui est censée englober tout: 1+1+dates+(sexe)+emménagement (mariage)+maison+(enfants)=Bonheur.
Les données entre parenthèse sont sujettes à changement d’ordre.
La théorie en anglais s’appelle le relationship escalator (je sais, toutes mes données viennent de sites en anglais, mais j’ai pas encore trouvé de sources francophones qui s’intéressent sérieusement au mouvement sex positive et qui me conviennent.) C’est une suite logique d’étapes à traverser dans une relation afin que celle-ci soit considérée comme « réussie ».
Et bien entendu, à la base, la relation se doit absolument d’être monogame.
UGH…
Mettons quelque chose très au clair immédiatement, je n’ai ABSOLUMENT RIEN CONTRE la monogamie. Je l’ai pratiqué avec succès personnellement et je crois que c’est une excellente forme de relation.
Je sais aussi que pour certaines personnes, c’est un défi énorme et qu’il est parfois impossible à relever. Ces femmes et ces hommes ne sont pas des pervers ou des écœurants, ils ont simplement une personnalité et des besoins qui sont incompatibles avec les attentes sociales irréalistes.
Penchons-nous d’abord sur la monogamie: pourquoi est-ce considéré comme la condition sine qua non d’une relation amoureuse? Comment en est on venu à penser cela?
La plupart des recherches en préhistoire semblent indiquer que dans les tribus nomades, les femmes et les hommes avaient de nombreux partenaires sexuels. Les théories, basées entre autre sur les comportements de certains primates, semblent indiquer que la raison était que les enfants étaient élevés par toute la tribut et il n’y avait donc aucun concept de paternité. Les biens étaient aussi communautaires, donc aucun concept de propriété. D’autres théories disaient qu’il y avait bel et bien un concept de paternité et que, pour protéger l’enfant, les femmes avaient de nombreux partenaires afin d’éliminer le risque que l’enfant soit brutalisé par les autres hommes de la tribu. Si la paternité est remise en question, tous les hommes étant potentiellement pères vont protéger l’enfant.
La monogamie est apparue avec la sédentarité. Lors de l’apparition de l’agriculture, le concept de propriété s’est développé et, avec lui, celui d’héritage. Il est donc devenu important de s’assurer que notre descendance est bien la nôtre afin de ne pas donner le fruit du labeur d’une vie au fils d’un autre. C’est une des raisons pour lesquelles dans plusieurs sociétés des débuts de l’histoire, la passation de biens se faisait de façon matrilinéaire (par la mère) puisqu’il est difficile de remettre en question la maternité d’une femme lorsqu’elle accouche de l’enfant, mais, avant l’arrivée des tests ADN, il était impossible de connaître à 100% la paternité d’un homme… C’est d’ailleurs pourquoi l’appartenance au judaïsme est fait, encore aujourd’hui, de cette façon. Pour être juif, il suffit d’être né d’une mère juive.
Donc, le concept de mariage et de monogamie est apparu à cette époque pour des raisons économiques et perdure encore aujourd’hui.
Le hic, c’est que nous ne somme plus une société agraire et que nos besoins primaires étant plus facilement satisfaits, nous avons développé de nouveaux besoins. Avant, et encore aujourd’hui dans certaines sociétés, le mariage était d’abord et avant tout un arrangement commercial. Je me charge de subvenir aux besoins de ta fille pour le restant de ses jours, et en échange elle me donnera des héritiers et m’aidera à développer ma ferme/mon commerce. La romance n’avait rien à voir là-dedans.
C’était comme ça dans toutes les couches de la société, du petit fermier au grand seigneur et encore plus dans les monarchies. Les reines n’étaient que des prix échangés au gré des alliances politiques, des usines à héritiers (on leur refusait le droit d’allaiter leurs enfants, sous prétexte que ça détruisait leur figure, ce qui ne leur donnait pas le répit que les fermières avaient avec la perte de fertilité qui vient avec l’allaitement) qui devaient vivre leur vie sous surveillance et constamment en représentation. Et très souvent, elles devenaient des êtres de second plan lorsque le roi se trouvait une maîtresse en titre qui devenait le centre de la cour à la place de la reine légitime. Bien entendu, protester contre cet état de fait était hors de question, à moins de vouloir terminer dans un couvent. Ce n’était pas un destin enviable et peu de femmes aujourd’hui accepteraient ce genre d’esclavage.
Le concept d’amour tel qu’on le connaît est relativement récent, mais il est encore fortement teinté des idéologies datant de l’époque antique. Ce n’est pas un mal en soi, mais le fait est que la monogamie n’est pas nécessairement un état naturel chez l’être humain et qu’il faut arrêter de le traiter comme allant de soit.
Pourquoi? Parce que la pression sociale qui vient avec cette assomption cause de graves problèmes dans plusieurs couples et chez beaucoup d’individus. La monogamie n’est pas un état naturel, et donc, elle demande un EFFORT. Ce n’est pas un état naturel et donc, le fait d’être attiré sexuellement par quelqu’un d’autre que son chum ou sa blonde est NORMAL. Ce n’est pas un indicateur que votre couple est fini, et ce n’est pas une raison pour paniquer. La fidélité, dans une relation monogame (ou autre), c’est de prendre consciemment la décision de ne pas AGIR sur le désir qu’on a d’une personne autre que notre partenaire officiel. Le désir est un sentiment sur lequel on a AUCUN contrôle, donc pour lequel on ne doit pas logiquement sentir de culpabilité. Nous avons cependant le contrôle sur ce qu’on fera de ce sentiment.
Cela étant dit, il est grand temps qu’on parles d’autre formes de relations amoureuse fidèles, en dehors de la monogamie. Parce qu’il est possible d’avoir une vie affective réussie en dehors des dictats sociaux sans pour autant être des monstres amoraux.
Le polyamour est une relation fidèle entre plus de deux partenaires. La polygamie est une forme de polyamour avec une dimension religieuse (les partenaires étant mariés). En général, il y a un partenaire principal et un partenaire secondaire (dans le vocabulaire du milieu, « main babe » et « side babe »). Parfois le side babe n’est qu’un partenaire sexuel, parfois il est un amoureux ou une amoureuse à part entière. Dans des cas plus rare (et dans la plupart des arrangements polygames) tous les partenaires sont égaux, il n’y a pas de main ou de side babe. Certaines relations polyamoureuses sont un triangle interconnecté, trois partenaires entretiennent une relation amoureuse à trois, ils habitent ensemble et ont des relations sexuelles à trois ou à deux avec tous les membres du triangle. La différence entre le polyamour et les relations « ouvertes » est que les partenaires se connaissent et qu’il y a exclusivité sexuelle, même si elle est à plus de deux partenaires.
Les relations ouvertes sont un accord pris par un couple pour avoir des partenaires en dehors du couple, sans exclusivité sexuelle et sans nécessairement rendre de comptes. Le couple ouvert aura des amants ou des maîtresse, mais n’aura d’attachement affectif qu’avec une seule personne. La fidélité ici est émotionnelle, si elle n’est pas physique.
Il arrive parfois qu’un des partenaires aite une relation polyamoureuse, alors que l’autre préfère des rencontres d’un soir. Rien n’est fixé dans le béton et tant que le tout est discuté et accepté par tous, it’s all good.
L’échangisme est un mélange des deux: des relations sexuelles hors du couple à un temps précis et avec un ou des partenaires approuvés par les deux membres du couple. Dans l’échangisme, il n’y a pas d’attachement affectif avec les partenaires hors du couple, sinon on tombe plus dans le spectre d’une relation polyamoureuse.
Il est important ici de comprendre que, comme pour l’orientation sexuelle, il n’y a pas de points définit et fixes, il s’agit ici de spectres et que tout est négociable. L’important c’est de définir dès le départ, les paramètres de la relation et de s’y tenir. Comme dans le cas d’une relation monogame, briser le contrat affectif équivaut à de l’infidélité et est ressenti comme une trahison. Ce n’est pas parce que ta copine a accepté que tu couches avec d’autres femmes qu’elle va prendre le fait que tu en ait mis une enceinte à la légère. Il est nécessaire pour cet aspect comme pour la majorité des décisions importantes de votre couple, que vous avanciez des hypothèses et que vous réfléchisiez à ce que vous vous croyez capable d’accepter et, au contraire, ce qui, pour vous est un deal breaker. Il est important de bien connaître vos limites et de les expliquer clairement. Une relation amoureuse, peu importe sa forme, nécessite une dose immense de confiance, et pour obtenir cette confiance, un respect absolut (de soi-même ET de l’autre) est essentiel.
Il faut énormément de communication, et pas seulement au début, lorsqu’on établis les paramètres de la relation, mais constamment. Il est possible que la relation évolue et que un ou les deux partenaires ressente le besoin de réévaluer les paramètres. Les sentiments et les besoins des gens évoluent au fur et a mesure que la relation prend forme et, par exemple, une personne sera à l’aise avec une relation ouverte avec son partenaire pendant des années, mais, ayant rencontré quelqu’un de spécial, voudra peut-être passer au polyamour. Un homme sera peut-être très à l’aise d’être monogame avec la mère de ses enfants, mais une fois ceux-ci partis de la maison, aura peut-être besoin de voir ailleurs pour pimenter sa vie sexuelle. Ce n’est pas nécessairement la fin de son mariage, s’il le fait avec l’accord de sa femme (et qu’elle a la même liberté si elle le souhaite, bien entendu). C’est souvent par l’échangisme que le piquant est remis dans ces couples.
Comme le dit la belle Arden Leigh, toutes les formes de relations ont leurs inconvénients, les relations monogames on le défi de la monotonie, les autres ont le défi de la jalousie. Il est essentiel d’être prêts à faire face à ces défis à deux. Que les deux partenaires soient compréhensifs face à la jalousie ou à l’ennui de leur partenaire et ne le prennent pas comme un affront personnel.
Le problème dans la société moderne, c’est qu’on assume dès le départ que toute relation avec quelqu’un se doit par défaut d’être monogame et rien d’autre. Une femme souhaitant une relation ouverte, ou un homme acceptant le side babe de sa blonde sont considérés soit comme des obsédés du cul ou des moutons qui se font niaiser par leur conjoint. On ne se pose même pas la question à savoir si la monogamie nous convient ou convient à notre partenaire. On cultive la culpabilité et le secret sur le désir qu’on peut avoir d’une autre personne et on se crée toute une mythologie du fruit défendu. Le fait est que pour plusieurs personnes dont la personnalité n’es pas compatible avec la monogamie, la pression sociale est si forte qu’ils se plient au modèle malgré eux et se retrouvent à commettre une infidélité qu’ils n’aurait peut-être pas commise dans un autre contexte.
Attention attention, je n’excuse pas ici l’infidélité et je ne la mets pas sur le dos du conjoint qui n’a pas donné d’alternative à la monogammie. Si vous trompez votre blonde, c’est VOTRE péché, PERSONNE ne vous a forcé à mettre votre quéquette dans le vagin d’une autre femme. C’est votre responsabilité de clarifier dès le début de la relation votre incapacité a vivre une relation monogame. Si votre partenaire ne peut accepter un autre type de relation et si vous ne pouvez vivre la monogamie, vous n’êtes simplement pas faits pour être ensemble et vous devriez cesser de gaspiller votre temps. Dès le moment où vous acceptez un « contrat relationel » monogame ou autre vous devez vous en tenir aux paramètres établis. Tout bris est VOTRE responsabilité, et un manque de respect total envers la personne que vous prétendez aimer.
Il est important de ne pas rejeter dès le départ des modèles alternatifs de relation et de ne pas les considérer comme dépravés par défaut. Tout type de relation, en autant qu’il soit bien définit et librement consenti par tous les membres, peut mener à une belle histoire d’amour.
Personnellement, je n’ai pratiqué que la monogamie, sans vraiment de problème, et je pense que je serais plus à l’aise à débuter une relation sur une base monogame, au moins le temps qu’on apprenne à se connaître, mais je ne serais pas totalement fermée à l’idée d’explorer d’autres avenues après quelque temps. La forme que ça pourrait prendre dépendrait beaucoup du genre de personnalité de mon conjoint et du niveau de communication que nous aurions dans notre couple.
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